Sortez vos bulles ! Le 1er février 2021, le Théâtre du Nouvel-Ontario célèbre les 50 ans, jour pour jour, de ce qui est considéré sa pièce fondatrice, Moé, j’viens du Nord ‘stie !
Depuis la grande première de la pièce, d’innombrables artistes, administrateurs, citoyens, bénévoles et spectateurs ont contribué à l’épanouissement du TNO, qui fêtera très bientôt ses 50 ans à lui. Pour souligner leur fougue, leur engagement et leur créativité, nous avons dépoussiéré quelques trésors de nos archives et sollicité la mémoire de gens qui ont marqué notre théâtre.
Nous vous invitons à remonter le temps au fil des prochains mois, en découvrant progressivement une cinquantaine de photos et de témoignages qui revisitent l’histoire du TNO de 1971 à aujourd’hui !
Années 1970
1971 : « Moé, j'viens du Nord 'stie »
« À je jour, je ne sais pas comment j’ai abouti dans ce Cercle.
Ce fut un Cercle de l’amitié, certes, mais surtout, ce fut un Cercle de Coming of Age.
J’avais 18 ans, j’arrivais en ville, littéralement. J’étais seule, en résidence sur le campus, j’étais sans repère, je ne connaissais personne. Je n’étais pas inscrite en théâtre, je ne connaissais pas Pierre Bélanger, prof et metteur en scène de La Troupe parce que je ne prenais pas de cours en sociologie avec lui. Mais je connaissais André Paiement, il était dans mon cours de Russe ! Cet homme était un électro-aimant. Il m’a attirée, convaincue, embarquée dans ce projet je ne me souviens plus trop comment, mais toujours est-il qu’un soir, je me suis retrouvée dans une réunion avec un paquet d’étudiants pareils et pas pareils comme moi qui ont dit oui à l’aventure d’écrire collectivement une pièce de théâtre. Je n’avais jamais écrit pour le théâtre, évidemment, je n’avais jamais joué au théâtre mais qu’à cela ne tienne, j’ai pris le bateau.
50 ans plus tard, c’est l’amitié de tous ces collègues qui m’habite encore. »
— Thérèse Boutin, membre de l’équipe de création
1972-1973 : « À mes fils bien aimés »
« Doux Jésus que la vie passe vite! À l’aube du TNO, la pièce À mes fils bien-aimés, a connue un succès dramatique malgré sa thématique un peu sombre et plutôt macabre. J’ai tenté de mettre en scène cette pièce d’André Paiement qui, d’une certaine façon, a été précurseur de son destin final. Cette pièce a suscité beaucoup d’émotions chez moi à cause de plusieurs conversations avec André durant notre tournée estivale du Théâtre Populaire du Québec. Il affirmait que lorsque qu’il aurait atteint ses 30 ans, son parcours d’artiste serait complet… « Son âme était un champ de bataille, son corps un charnier ou le « bon » a triomphé du « méchant » en lui faisant subir l’ultime mal. » (Le Grand Livre, Gaston Tremblay p. 412) Ce sont donc des souvenirs aigres-doux qui me hantent en écrivant ces quelques lignes 50 ans plus tard. »
— Jean Paul Gagnon, membre de l’équipe de création
1973-1974 : « La vie et les temps de Médéric Boileau »
« Sur la photo, Suzie Beauchemin et André Paiement se maquillent devant le miroir, alors que Marcel Aymar est en attente, à droite. Nous étions en tournée pour la pièce La vie et les temps de Médéric Boileau, en 1973.
Cette période était riche en rencontres et en création. Je me rappelle quand André sortait de sa chambre sur le boulevard Lasalle, à Sudbury, où André, Marcel et moi-même vivions, et qu’il nous faisait rire avec des bouts de texte qu’il venait d’écrire. C’était un grand dramaturge et l’auteur de plusieurs chansons.
Disparue trop tôt, Suzie avec un grand cœur et se donnait tellement comme comédienne qu’une chanson de CANO écrite par Rachel Paiement, qui jouait aussi dans cette pièce, lui est dédiée.
Quand je regarde Marcel, ça me rappelle les frissons que j’avais quand je l’entendais pratiquer sa guitare classique. Il n’est pas seulement un bon comédien, mais aussi un grand concepteur et musicien.
André Paiement a eu une grande influence sur ma façon de créer et c’est pourquoi j’ai toujours continué de travailler sur des productions franco-ontariennes, que ce soit en musique ou en théâtre. »
— Mark Delorme, décors et éclairages
1974-1975 : « Lavalléville » (Première version)
« La source d’inspiration pour Lavalléville est née lors d’une visite à un petit village dans le nord-ouest de l’Ontario pendant la tournée de la pièce À mes fils bien-aimés en 1972. André, Marcel Aymar, Daniel Jacques et moi étions en tournée pour cette pièce, quand nous sommes arrivés à Dubreuilville, à quelques centaines de kilomètres à l’ouest du Sault-Ste-Marie.
Dubreuilville, un village « fermé » appartenu par les frères Dubreuil, était franchi par un chemin privé d’environ 40 kilomètres à partir de la route transcanadienne 17. Les véhicules devaient s’enregistrer à la porte située au niveau de l’embranchement de la 17 et de la route qui s’acheminait vers la ville. Si vous n’aviez pas de raison valable pour visiter Dubreuilville, l’accès vous était refusé.
Le village était centré sur une scierie où les travaillants dépensaient leurs gages au marché Dubreuil, à la quincaillerie Dubreuil et au Centre des loisirs Dubreuil, tous sous la tutelle des frères Dubreuil.
André était tellement bouleversé par le phénomène d’un village « fermé », c’est-à-dire privé, contrôlé par des propriétaires où les travailleurs n’avaient presqu’aucun contrôle sur leurs destins, qu’il a décidé d’écrire une pièce musicale basée sur ce concept.
Par ce temps David Burt, futur membre du groupe CANO, s’était déjà déplacé à Sudbury, en partie par l’allure du talent d’André, mais aussi par l’allure de sa sœur Rachel, qui était sa bien-aimée à ce moment. Après avoir travaillé avec André et Marcel Aymar sur la musique pour La Vie et les temps de Médéric Boileau en 1973, David a collaboré avec eux et Rachel à la création des compositions musicales de Lavalléville en plus que pour Le Malade imaginaire en 1975.
Partie du génie d’André est qu’il s’entourait de gens créatifs qui pouvaient faciliter la réalisation de ses grandes idées. Une de celles-ci était la formation d’un groupe musicale. Grâce au succès de la collaboration entre André, David, Marcel et Rachel, ceci a signalé, pour toute fin pratique, le début du groupe musical CANO.
Je suis certain que si André était vivant aujourd’hui il aurait épanoui Lavalléville en une grande pièce musicale à l’envergure des grands spectacles de Broadway. Celui-ci aurait incorporé non seulement les chansons originales de la pièce musicale mais plusieurs autres que CANO a composés depuis. »
— Michael Gallagher, membre de l’équipe de création
1975 : Suzie Beauchemin
« 1975. Sudbury. Fin octobre.
Je viens tout juste de célébrer mes 23 ans et la vie est belle.
J’habite seul dans un petit appartement dans le Donavan sur Frood.
Ça commence à sentir l’hiver.
J’entends les trains rouler jour et nuit sur les tracks juste à côté
et le ciel est bleu et grand et magnifique.
Déjà quatre ans que je suis ici, loin de ma Baie Sainte-Marie,
mais je suis bien et à ma place.
J’ai pas beaucoup d’argent, mais so what, j’ai tout ce qu’il me faut.
J’ai surtout plein d’amis…
André et Michael et Robert et Daniel et Ti-Coq et Cid et Dave et tellement d’autres.
Et Suzie.
Suzie est arrivée au TNO comme une boule de feu.
Intelligente. Intense. Passionnée.
Comme André.
Et une fois ensemble,
ces deux-là se sont jamais lâchés.
1975. Ottawa. Fin octobre.
Sur une scène dans une salle qui est maintenant La Nouvelle Scène.
C’est le tout premier spectacle CANO Musique.
Soudainement, entre deux tunes, comme un coup de théâtre
un policier entre dans la salle pour faire une annonce.
Il y a un téléphone d’urgence pour… ???
Personne ne comprend pour qui, exactement.
Pas longtemps après, André, dépourvu par sa tristesse,
m’avoue avoir eu le sentiment que cet appel de téléphone était bel et bien pour lui.
Il avait raison.
1975. Sudbury. Mi-décembre.
C’est le premier show CANO chez nous.
La Slague est pleine à craquer.
Il y a de la magie dans l’air et tous les amis sont là…
sauf une.
Et André lui chante cette chanson.
Maro Eo Ma Mestrez (La Mort de Ma Bien-Aimée).
Et avec lui,
la salle pleure
notre chère Suzie. »
— Marcel Aymar, concepteur sonore
1976 : « Ici et maintenant »
« Nous avons créés deux spectacles en 1976 dans le cadre d’un travail d’été au Théâtre du Nouvel Ontario: Du coq à l’âne et Ici et maintenant.
Nous étions huit adolescents, amoureux et passionné de théâtre de la région de Sudbury, qui avons eu le privilège de faire partie de cette troupe jeunesse animé par Robert Marinier et Nicole Beauchamp.
Un travail d’été de rêve qui nous a permis de vivre en français une expérience de vie et de création inoubliable. Il y avait de la formation le matin avec des cours de mouvements, de voix, de jeu et d’improvisation et en après-midi un travail de répétition se poursuivait en mode création collective. Nous avons présentés ces deux spectacles à la Slague et dans les parcs de la région. »
— Fernand Rainville, membre de l’équipe de création
1976-1977 : « Ti-Jean de mon pays »
« Quelle aventure!
Imaginez l’immense privilège que j’ai vécu à 20 ans d’avoir été comédien en résidence au TNO pendant la saison 1976/1977. Un salaire hebdomadaire…euh wow!
La saison débute avec La ménagerie de verre de Tennessee Williams (mise en scène Eugène Gallant) suivie d’une délicieuse production de la pièce Le bourgeois gentilhomme de Molière (mise en scène François Legault), pièce qui réunissait professionnels et amateurs sur scène, et pour terminer la saison en beauté la création de l’immense succès Ti-Jean de mon pays, pièce écrite par Nicole Beauchamp. Cette œuvre parsemée de chansons est inspirée des contes folkloriques du Père Germain Lemieux dans une mise en scène de Hélène Gravel. Quarante quatre ans plus tard j’entends encore les enfants et les adultes se tordre de rire…des cascades de rires!! Nous, Robert Marinier, Paulette Légère, Nicole Beauchamp et moi avons fait le bonheur des spectateurs d’un bout à l’autre du Canada. Lors de cette tournée j’ai passé mes auditions pour entrer à l’École Nationale de Théâtre du Canada et j’ai été accepté! J’exerce mon métier à ce jour. Que de beaux souvenirs. Merci, je suis très reconnaissant.
VIVE TI-JEAN, VIVE LE TNO!!! »
— Pier Paquette, comédien
1976-1977 : « Le Bourgeois gentilhomme »
« Un gros show au TNO! Le Bourgeois gentilhomme! Un mélange de professionnels et d’amateurs. Ma première pièce. J’avais 18 ans et j’avais passé mon adolescence avec ma gang, Danielle Tremblay et Paulette Levesque, à côtoyer les « grands » . Quelle chance que l’on avait d’être en compagnie d’André Paiement, Marcel Aymar, Suzie Beauchemin, Robert Dickson et tout le reste de la gang du TNO, de Cano Musique, Prise de Parole, la GNO… Imaginer être si jeune et se retrouver en plein milieu de cette énergie fulgurante qu’était Sudbury. Et un jour, à un festival de Théâtre Action à Cornwall, j’ai revu Robert Marinier qui arrivait de l’École nationale de théâtre. Et lui, c’était le vrai gentilhomme !
Ma première pièce, mon premier amour. »
— Cate Mensour, comédienne
1977-1978 : « Scènes d'amour »
« Cette photo me rappelle que mon premier contrat professionnel au théâtre, c’est au Théâtre du Nouvel Ontario que je l’ai vécu. Et cela, grâce à Robert Marinier.
On s’est connu à l’École Nationale de Théâtre à Montréal en 1973. J’arrivais du Nouveau-Brunswick, lui de Subdury, Ontario, contrairement à nos confrères et consœurs de classe qui étaient tous québécois. Nous étions des « outsiders » si on peut dire. J’ai vite ressenti une sorte de complicité tacite. Nous avions un bagage culturel qui se ressemblait.
À la fin de notre formation, lorsque Robert m’a parlé de la possibilité de travailler au TNO j’ai sauté sur l’occasion. Je trouvais réjouissant de pouvoir travailler au théâtre pendant plusieurs mois à l’extérieur de Montréal.
J’ai atterri à Sudbury et y ai découvert son étrange paysage lunaire à l’époque. J’ai connu la Slague dont le nom évoquait les résidus de l’exploitation minière, m’a-t-on dit. J’y ai fait la rencontre d’une dame remarquable : l’enseignante Hélène Gravel .
J’ai goûté au froid mordant du Nord, admiré son ciel magnifique et été témoin d’une grande effervescence culturelle. C’est là que j’ai entendu parler pour la première fois des éditions Prise de Parole, de Robert Dickson, d’André Paiement, de Cano en plus de découvrir les œuvres d’artistes visuels.
Cette effervescence persiste encore aujourd’hui et je dis ‘Chapeau !’ »
— Katherine Kilfoil, comédienne
1978-1979 : « Et si le p'tit chaperon rouge n'avait pas rencontré le loup »
« Dès sa création, le TNO présente du théâtre pour enfants. On y voit le moyen de joindre un nouvel auditoire tout en créant des occasions de travail pour les artistes d’ici. C’est également l’occasion de mettre à contribution les comédiennes et comédiens maison généralement embauchés à salaire pour une année. Plusieurs des spectacles jeunesse, dont Ti-Jean fin voleur, s’inspirent des contes du folklore franco-ontarien. À la fin des années 1970, deux textes inédits sont offerts en tournée dans le Nord de l’Ontario, mais aussi en Acadie et au Manitoba. Et si le p’tit chaperon rouge n’avait pas rencontré le loup, texte et mise en scène d’André Roy, est présenté 75 fois. Quant à « Bonjour le monde », une création de Mariette Théberge, sa tournée comptera 50 arrêts. À ce jour, les tournées de ces deux spectacles sont parmi les plus importantes du TNO, bien que s’étant déroulées à une époque où aucun réel circuit de diffusion n’existait encore. »
— Alain Poirier, membre de l’équipe
1978-1979 : « En plein Paiement »
« J’ai été incapable de commenter cette photo, car elle éveille chez moi trop de souvenances douloureuses. Plutôt que de me prélasser dans ma tristesse, j’ai cru bon de vous présenter des extraits d’une lettre que Paul-André Paiement m’a écrite en 1972. Quand André était de bonne humeur, il l’était pour le vrai. Le metteur en scène, Brian David, s’est inspiré de cette lettre pour écrire une ou deux scènes de la pièce En plein Paiement. »
— Gaston Tremblay
« Mon cher ami,
J’écris en ce moment avec une plume fontaine. Elle ressemble beaucoup à la grande plume [d’oie] rouge que j’avais il y a déjà trop longtemps. Seulement elle est noire.
Je travaille pour le Théâtre populaire du Québec. Je suis bien heureux ici pour le moment. Je suis avec Jean-Paul [Gagnon] et Robert [Paquette]. On s’amuse bien.
Maintenant, je fais ma vie en théâtre et en musique, c’est grand d’avoir trouvé. C’est beaucoup. Il ne reste qu’à faire faire de son mieux. Je crois que je vais bien faire, je crois, même aller très loin.
Le théâtre, parce que je suis menteur, la musique parce que je cherche l’authenticité. Avec le T. P. Q., je fais du bon travail. Nous allons faire des sketches dans les terrains de camping. Le travail est permanent et se continue en septembre dans les écoles et les théâtres de Montréal, mais moi je reviens chez nous. J’ai la ferme [CANO à Earlton] et mes amis qui m’attendent et surtout j’ai la troupe du T. N.-O.
La musique, ça va très bien. Je joue avec Robert maintenant. J’en suis très fier. Il est un professeur excellent et un génie musical. Il compose maintenant de très belles pièces classiques qui te font vibrer partout. J’apprends aussi à jouer la flute et le xylophone. J’aime ça.
À part de ça, je ne pense pas avoir changé beaucoup. Je suis toujours pas mal sauteux partout comme le petit Chester, l’ami de Spike, dans les Looney Tunes et je tâche d’être de bonne humeur.
Tu sais la semaine prochaine, j’aurai 22 ans. Wow ! C’est fantastique. J’ai les cheveux très longs maintenant comme j’ai toujours voulu.
Il est maintenant environ 2 h de la nuit et je dois te laisser, car le matin vient vite et je travaille. Ha ! Ha !
Je te souhaite bonne nuit où que tu sois et à moi ici à Montréal. »
1979-1980 : « Môman travaille pas, a trop d'ouvrage »
« Le TNO a toujours occupé une place spéciale dans ma vie ainsi que dans ma mémoire. Non seulement parce qu’il a toujours représenté depuis sa fondation une voix artistique forte, mais parce que les créatrices et créateurs qui y ont travaillé ont marqué l’imaginaire collectif de l’Ontario français. Ce n’est pas tant les deux productions auxquelles j’ai participé qui alimentent encore aujourd’hui chez moi cette mémoire, mais tous les échanges que j’ai pu avoir avec des personnes passionnées par les arts. Si je n’avais à choisir que deux qualificatifs pour représenter la signification de cette passion, j’opterais pour les termes engagé et fou. Cette belle folie qui dépasse les bornes. Cette belle folie qui fait en sorte que nous ressentons une vitalité. Cette belle folie qui grave d’un sceau dans notre mémoire des instants inoubliables. Pour moi le TNO est, par sa présence artistique, un marqueur de vie, qui date peut-être de 50 ans, mais qui échappe au temps. »
— Mariette Théberge, comédienne
Années 1980
1980-1981 : « La tante »
« Debout, de gauche à droite, Jacques Thériault, Christine Paquette et André Roy, les trois excellents interprètes de ma deuxième pièce La tante, présentée au TNO en décembre 1980. En bas, celui qui porte la moustache, c’est moi, Robert Marinier. Cette photo me rappelle beaucoup de souvenirs, des bons et des moins bons. C’est un plaisir de me baigner à nouveau dans ce qui me revient de la pro-duction: l’engagement des comédiens, la façon qu’ils avaient campé leurs per-sonnages, notre plaisir en répétition. Mais ça me rappelle aussi les difficultés au TNO à l’époque : le fait qu’on nous avait obligés d’aller chercher des directions artistiques et administratives plus crédibles, donc de la métropole – la connexion au milieu et une compréhension de la culture locale, on oublie ça. Cette initia-tive des bailleurs de fonds avait fait en sorte que le TNO allait devoir exister toute la saison suivante dans l’ordinateur d’Yvan Rancourt en attendant l’arrivée salutaire de Brigitte Haentjens. Mais de tous les souvenirs que cette photo peut susciter, je n’arrive pas à me rappeler une chose : pourquoi je pensais que c’était une bonne idée de porter cette affreuse moustache. »
— Robert Marinier, auteur et metteur en scène
1982-1983 : « L'opéra du gros cinq cennes »
« C’est grâce à Sylvie Lavoie, une copine de classe et de théâtre au secondaire qui participait aussi à la pièce que je me suis jointe à la troupe pour la pièce L’opéra du gros cinq cennes. Un tout petit rôle mais un bon souvenir quand même. J’ai pu côtoyer plusieurs personnes qui ont été actifs et qui continuent de l’être dans le monde des arts.
Plus tard, en 2017 et par pur hasard, j’ai été invitée au gala du Prix du Gouverneur général. C’est l’année que Brigitte Haentjens recevait son prix. J’avais apporté le livret de la pièce que j’avais toujours et elle a eu la gentillesse de me le dédicacer. »
— Julie Noël de Tilly, comédienne
1983 : Sticks and Stones
« In the early 80s, Paulette Gagnon was responsible for coordinating cultural animation projects for the TNO. She gathered together a group of young feminists and activists who wanted to change the world and she offered us the possibilities of using theatre as a tool for social change. Under her inspired leadership, we became Sticks and Stones Feminist Theatre and Popular Education Troupe. Our first production was a theatre-forum on the issue of domestic violence against women called Battered Wives that travelled and toured in Northern Ontario and Manitoba. We performed in bingo halls, community centres, high school auditoriums, conference rooms, street corners, bus stops, wherever we could find an audience. Our focus was popular theatre, exploring and experimenting with Boal theatre techniques, street theatre, satire and clown to tell the stories and raise issues of social injustice, particularly as they affected women and LGBTQ. As well as performing, Sticks and Stones offered popular theatre workshops that engaged people in creating their own theatre based on their own stories. The troupe’s work laid the foundations for real social change in our community as well as for many of the ways that art and theatre are now integrated into activism. (None of this would have been possible without the TNO and Paulette) »
— Laurie McGauley, membre du collectif
1983-1984 : « Au pays de Ti-Jean »
« C’est bon d’vous dire…C’était 1983, le début d’une période qui a vu un renouvellement de l’intérêt dans le folklore franco-ontarien, et surtout Ti-Jean, grâce beaucoup au Père Lemieux et sa collection “Les vieux m’ont conté”. Je venais d’une famille de conteur (voir mon grand-oncle Maurice Prud’homme, Les vieux m’ont contés, tômes 7 à 11) et c’est un sujet qui m’intéressait beaucoup. À l’université ma concentration était musique, mais ma continuation était le folklore avec Jean-Pierre Pichette.
Au pays de Ti-Jean était un des premiers de plusieurs projets axés sur Ti-jean qui ont été produits dans ces temps là, entre autres, C’est bon d’vous dire (TNO) et les seriés radiophonique Histoire de Conter I et II , avec le pépére Cam (SRC), qui ont aussi sorties en version cassette.
À ce moment là, je tournais avec le spectacle pour enfants Pierre et le Papillon, et Pierre (Germain), qui avait déjà travaillé avec le TNO dans ses tout débuts, m’a recommandé comme compositeur pour Au pays de Ti-Jean. C’était ma première collaboration avec le TNO. Tout se passait au Canada Bread, 90, rue King. Les comédiens? Kim Cholette, Dominic Lavallée, Stéphane Lestage, Danielle St-Aubin, et nul autre que Brigitte Haentjens, qui je crois assumait la direction artistique au TNO dans le temps. La création de la musique a été partagé par Pierre et moi.
Mes trois cues ont étés enrégistrés dans un p’tit studio 8 pistes, qui était dans le building qui faisait face au Rainbow Mall sur la Elm. J’étais un gros fan de Claude Bolling et ses marriage de jazz et de musique baroque, alors je me suis servi du même principe, mais jazz/musique folklorique pour une couple des cues. Pour les performances, tout était sur 1/2 inch tape (comme était pas mal standard dans le temps). On se servait de “leader” transparent entre les
cues pour que la machine arrête automatiquement quand le cue était fini.
Les scores et les partitions étaient toutes écrits à la main. Instrumentation: mandoline, flûte, guitares classiques, violoncelle, violon, xylophone jouet, contrebasse, clarinette, batteries et percs.
La pièce a joué à Sudbury novembre 1983, et mars, octobre, novembre 1985, et partout en Ontario pour un total de 100 représentations. En plus, la pièce a été présenté et tournée par le Théâtre Populaire d’Acadie en 1987. C’était une expérience incroyable, et très formative pour moi. »
— Daniel Bédard, concepteur sonore
1983-1984 : « Nickel »
« Nickel, un de mes beaux, beaux souvenirs de création! En 1984. Jean Marc Dalpé et moi, nous voulions écrire sur la mine. Elle fait partie intégrante du paysage de Sudbury, la géographie en est marquée, tout comme le tissu social et l’histoire de la ville. Nos voisins étaient polonais ou ukrainiens, italiens. Les grèves à l’INCO et Falconbridge ont cisaillé la vie quotidienne durant tout mon séjour dans cette ville surveillée par un gros cinq-cennes et surplombée par une immense et sinistre cheminée. Nous avons rencontré des mineurs, des femmes de mineurs, dont plusieurs avaient perdu leur mari lors d’un accident au fond du « trou ». Nous avons écouté leurs histoires, leurs récits. Nous avons emprunté la « cage » métallique qui emmène les hommes dans les boyaux de la terre et les ramène à la surface dans un bruit d’enfer. Et puis, cette histoire de lutte entre deux syndicats qui a déchiré des amis et des familles nous passionnait. Je me souviens que nous avions beaucoup d’ambition pour la création de cette pièce. Nous désirions écrire une « histoire d’amour sur fond de mines », où les différentes communautés soient représentées et les langues mêlées. Et puis, il nous fallait du monde, des moyens, car nous désirions une production d’envergure. Grâce à l’aide du CNA, nous avons eu accès à des ressources en scénographie, aux costumes, à la lumière. Le décor était de fer et les comédiens s’en souviennent qui ont dû le monter et le démonter en tournée. Jean Marc Dalpé, Robert Marinier, Robert Bellefeuille, Kim Cholette faisaient partie de la distribution. J’ai encore en tête la chanson qu’avait composée Daisy DeBolt « cage monte ». Un souvenir d’autant plus marquant qu’il a constitué une étape dans la vie du Théâtre du Nouvel-Ontario. Et qui nous a valu la réputation « d’infiltrés communistes » de la part de certaines éminences grises de l’Université Laurentienne! »
— Brigitte Haentjens, directrice artistique et metteure en scène
1984-1985 : « Entre deux »
« Sur cette photo noir et blanc qui date de 1985-86, on y voit deux tis-culs. L’un d’Ottawa et l’autre de Hearst, deux manteaux de cuir, un noir et un gris, et ma belle Volvo ’76.
Jean-Marc et moi, on se connaissait depuis déjà un p’tit bout et le jour où on s’est retrouvés face à face, les yeux dans les yeux, on a bien vu qu’il y avait un p’tit « kekchose » entre nous. Tellement qu’on a fini par se dire : Faut! Faut absolument faire quelque chose ensemble! Ben, croyez-le ou non, le lendemain si ce n’est pas le jour même ou la journée d’avant, le TNO en avait déjà eu vent.
On a donc travaillé sous l’œil rieur et bienveillant de Brigitte Haentjens. Ça allait ben, le show de poésie prenait forme, mais il nous fallait trouver un titre! Mais ça, c’est pas été évident. Je ne sais plus combien de jours et d’heures on a passées à se tirer et se tournoyer les poils de la moustache, -je parle de Jean-Marc, la mienne ne poussait pas. Mais comme le génie et le talent finissent toujours par avoir raison, un jour on s’est écrié : ENTRE DEUX !!! Plutôt simple comme titre, j’en conviens, mais comme vous dirait Jean-Marc « Fallait y penser et c’est en plein ça qu’on fait! »
Merci de tout cœur et longue vie au TNO! »
— Michel Vallières, comédien
1985-1986 : « On n'est pas des enfants d'école »
« Quel plaisir de travailler sur la production « On n’est pas des enfants d’école»! Premièrement, parce que le TNO c’était la place la plus kool où travailler, deuxièmement, parce que je travaillais sur un décor avec mon chum mais aussi parce que le travail d’équipe me manquait beaucoup. Je n’avais pas participé à une production de théâtre depuis les 70 avec Suzie et la gang du Moulinet.
Gérald était responsable de la construction du décor et des meubles et moi de la sculpture. Mon bébé à mes côtés, je taillais toutes sortes de créatures dans des piles de matelas d’éponge laminés.
Et, pendant ce temps, Antoine à l’âge de 2 ans est tombé amoureux de Diddle, la comédienne principale.
Finalement, notre décor était tellement magnifique, j’me dois de le dire, qu’à la fin de la tournée pan canadienne, une compagnie de Théâtre à Vancouver l’a emporté pour la grande somme de 4 500$! »
— Danielle Tremblay, décors
1986-1987 : « La déprime »
« Résumé
La pièce La déprime raconte une journée dans un terminus d’autobus Voyageur.
Temps
Automne 1987.
Personnages
Hélène Dallaire, metteure en scène, mi-trentaine, elle habite à Sudbury depuis peu.
Paulette Gagnon, animatrice-administratrice du Théâtre du Nouvel Ontario l’invite à monter le spectacle de théâtre communautaire. C’est le début d’une collaboration sans cesse renouvelé depuis ce temps.
La distribution compte 28 comédiennes et comédiens amateurs de Sudbury qui se partagent une cinquantaine de personnages. Pour en nommer quelques-uns: Luc Lagrandeur, Yvon Gauthier, Raymond Lalonde, Bernard Dallaire, Alexie Lalonde-Steidman, Garry McKinny, Louis Lefebvre, Gilles Larose…
Décor
Dans la grande salle du Canada Bread où avaient lieu les répétitions de la pièce.
Équipe de production
Une douzaine de personnes dont Gérald Beaulieu, Danielle Tremblay, Céline Maltais et aux éclairages, le seul et unique Jean-Marc Dalpé.
Le spectacle amateur du Théâtre du Nouvel Ontario, une pratique bien ancrée dans le cœur de sa communauté! »
— Hélène Dallaire, metteure en scène
1987-1988 : « Le chien » (Première version)
« Souvenir, souvenirs …
Robert, Roger, Lionel, Marthe, Roy, Hélène … dans … « musicien et acteurs de la création posant sur pente en plywood »
En regardant cette photo, me reviennent en tête et en cœur, quelques impressions … — Quelle histoire ! Quelles paroles ! Quels personnages ! Quels acteurs ! Quelles images ! Quel show ! — et un mot … Intense !!
Avoir eu l’honneur de « promener » Le chien, de l’Ontario au Québec à la France, fut source de fierté et de bonheur … aussi intenses !
Bravo et merci Jean Marc, Brigitte, TNO, gang. »
— Diane Fortin, assistance à la mise en scène et régie
1988-1989 : « Cris et blues »
« DANS MA SOUVENANCE
Dès la première journée des répétitions, la fête a pris
Comme on le dit d’un feu
Avec flammes, étincelles, fou rires, émotions.
Nous – encore jeunes, minces, pas pire beaux avouez – en cercle autour des micros
Brigitte en face
Un show de gars? O que oui
Et quand Ti-Coq nous rejoint pour les éclairages et la tournée
De ti-gars même par bout’e (ok ok… souvent)
Brigitte rit fort. C’est bon signe.
On l’entend rire sur l’enregistrement à la Coulson
Ok ok… mon’onc’ invente… mais c’est son métier
Entéka plein de monde ont ri ce jour-là
Là où mènent tous les chemins
On les entend
Ça crépite
Et soutenant la fête
Sa raison d’être
La poésie du nord
L’âme du nord
IMMENSE »
— Jean Marc Dalpé, auteur et comédien
Années 1990
1990 : L'équipe
« C’est au printemps 1990. En face de l’édifice du Canada Bread, le 90 King.
Maison du TNO pendant près de 15 ans. Là où j’ai d’abord appris, puis adhéré au rêve de bâtir notre propre salle de spectacle.
Cette année-là on préparait les célébrations du 20e du TNO et la publication du livre relatant cette histoire.
Cette année-là Brigitte Haentjens passait le flambeau à Sylvie Dufour.
Je me rappelle l’effervescence des saisons artistiques, la passion et la détermination de l’équipe qui investissait sans compter temps et énergie pour réaliser sa vision commune, celle d’avoir un lieu d’accueil bien à soi.
Feu Yves-Gérard, Nicole, Gérald, feue Paulette (maudit que je m’ennuie!), Alain, moi (enceinte de 8 mois), Sylvie, Annette, Brigitte et Thérèse…
Quel privilège j’ai eu de travailler avec vous! Nous formions une équipe du tonnerre, vous en conviendrez.
C’était le début de mon long parcours au sein des organismes artistiques de Sudbury. Cette famille culturelle a grandi et a continué de rêver. Bientôt c’est dans notre magnifique lieu rassembleur que nous pourrons célébrer comme il se doit, les 50 ans du Théâtre du Nouvel-Ontario! Y serez-vous? »
— Sylvie Lessard, administratrice polyvalente
1991-1992 : « Les ordres du jour »
« En 1999 quand le TNO m’offrait d’œuvrer à la conception et la construction d’un décor pour Du pépin à la fissure, j’étais commissionné à produire un environnement qui faciliterait l’expression des fantasmes poétiques de Patrice Desbiens assumé par Le maître-livreur de poésie, Alain Doom, et le tout sous la direction d’André Perrier AKA Roger Rabbit à cause de ses créations loufoques …ouf! Voir un phobique des hauteurs « flyer », pirouetter et « superphysiqualiser » de la poésie pendant une heure ne pouvait que provoquer mon dépassement. Ce dépassement impliquait construire un décor sans recevoir des plans de construction et où la mise en scène dictait journalièrement l’évolution de mon travail. Coincé entre le génie artistique d’un Alain Doom et le génie pragmatique d’un Alain Haché en atelier, j’ai dû apprendre à fonctionner Alain/proviste…
P.S. « I was born with a golden voice ». – Leonard Cohen « Tower of Song »
… pourrait aussi dire un Alain Doom, ne voulant pas nous accabler d’une historique de travail ardu pour une excellence dont lui seul sous-estime… »
— Gérald Beaulieu, concepteur et bâtisseur de décors
1991-1992 : « Canada Bread »
« Canada Bread, ici l’équipe est dans le four, une des étapes de la performance/installation/spectacle. Le four est là où tout lève, les spectateurs, environ quarante par représentation, y sont entassés, et ils ont chaud, le sol crépite et le rideau s’ouvre sur des travailleurs culturel en grève. No pain no gain, pas de pain pas de gain.
Cet événement collaboratif entre le TNO et Perspective 8 fut marquant et imprégner dans la mémoire des spectateurs qui furent peu nombreux due aux contraintes de l’événement. «Canada Bread», fut un évènement exceptionnel, remarqué par le Conseil des Arts du Canada, un des bailleurs de fonds. Dans Canada Bread situé dans l’édifice de Canada Bread, tout tournait autour du pain, nous avons exploré ce que le pain représente dans notre culture et celle du Moulin à fleur, Flour Mill. Nous y avons célébré l’arbre de pain et couronné la Reine du pain. Malheureusement mal documenté, trop sombre pour la capture vidéo de l’époque, et où le flash délavait tout. Il en demeure un événement phare du TNO. »
— Laurent Vaillancourt, auteur, comédien et décors
1992-1993 : L'équipe
« Le TNO pour moi est encore synonyme du 90, rue King et d’une belle et glorieuse époque de création, de coups de gueule et d’affirmation. Pour le jeune homme que j’étais, appartenir à cette gang et contribuer à son essor est venu naturellement, mais je réalise aujourd’hui l’immense privilège qui m’a été accordé.
Durant les années 90, le TNO a fait de la création, évidemment, mais il a aussi travaillé à une certaine démocratisation de la pratique théâtrale en Ontario français. On en a fait de la tournée! On a développé des partenariats avec des bénévoles à Sturgeon Falls, à Noëlville et à Elliot Lake pour l’accueil de spectacles. On a pris des petites salles communautaires à Sudbury comme le Club Alouette et on les a transformées en vraies salles de théâtre, l’espace d’une semaine ou deux de représentations. On a fait vibrer la poésie de Cris et blues dans les villes et villages partout en Ontario. On y a présenté French Town et Deuxième souffle et bien d’autres encore. Il y a eu plusieurs partenariats au pays et à l’international, dont nos premiers échanges avec la compagnie Debajemejig de l’île Manitoulin pour The Manitoulin Incident.
Mais aussi, le TNO de la rue King a été un haut lieu de rassemblement festif pour plusieurs communautés locales, provinciales, nationales, théâtrales, artistiques, LGBTQ+, les punks, les anarchistes, les femmes et pleins d’autres. Toutes ces rencontres étaient des prétextes à la fête. Il y a eu tellement de soirées passées autour de sa légendaire table de pool, tant nuits à danser, tant de bonnes bouffes. Les belles rencontres et les partys qu’il y a eu dans cette bâtisse là, j’vous dis pas. J’vous ai même pas parlé de sa torpinouche de fournaise qu’il fallait tout l’temps aller checker. Ça, comme disait l’autre, si vous vous en souvenez, c’est que vous n’étiez pas vraiment là.
Le TNO était à sa naissance un pur produit de la contre-culture des années 70, puis ses différentes incarnations par la suite se sont toujours nourries de cet esprit. L’ancienne Slague n’est plus, non plus le 90 rue King. Bientôt, le TNO du Collège Boréal viendra les rejoindre dans la mémoire collective des incarnations physiques de ce théâtre. Mais peu importe où il s’installe, le cœur, l’esprit et l’audace du TNO demeurent toujours bien vivants. Longue vie au TNO! »
— Alain Harvey, administrateur
1992-1993 : « Frenchtown »
« Premières armes. Premiers pas. Le fondement de ma démarche… Je commençais. J’étais ouvert, perméable. Beaucoup d’hésitations, puis un jour l’étincelle : lier cette histoire de famille au passé oublié de mon village natal, à l’actualité, à mes souvenirs, à mon rapport à la grammaire française; ainsi trouver une nouvelle manière de faire, faire éclater le temps, faire résonner les mots, les voix… Marcher dans le fond de la salle de répétition pendant que, autour d’une table, les comédiennes et les comédiens cherchaient la manière de se mettre dans la bouche mon texte en développement. Sentir le rythme des phrases, la tension, la sonorité. Être nourri par ça. Révélation. »
— Michel Ouellette, auteur
« J’en étais à mes tout débuts comme directrice artistique lorsque j’ai invité Michel Ouellette à titre d’auteur en résidence au Théâtre du Nouvel-Ontario.
Il est arrivé avec plusieurs textes, plusieurs idées. Je me souviens d’avoir été étonnée, tellement il avait besoin de dire, de se raconter. Son écriture mettait en lumière les gens du nord. J’ai glissé avec aisance dans son imaginaire à la rencontre de ces personnages issus des mines, des moulins à bois, des forges.
Au milieu du parcours une lueur nous a guidé sur la route de Fench Town.
J’y ai découvert des êtres écorchés, aimants, engagés, porteurs d’une grande fierté. French Town s’est avéré être un diamant, un minerai ultime, que Michel à offert au Théâtre du Nouvel Ontario.
Un cadeau comme il en arrive rarement. »
— Sylvie Dufour, directrice artistique
1994 : « The Manitoulin Incident »
« Dès ma première visite à l’île Manitoulin, je suis tombée sous le charme, Et puis, il y a eu ce désir de collaborer avec le Debajehmujig Theatre Group, une troupe ojibway installée dans la réserve non-cédée de Wikwemikong. À titre de partenaire, le TNO a embarqué dans la belle aventure de cette création présentée en plein air, dans l’enceinte des vestiges de l’ancien monastère. Louis Lefebvre et Bruno Gaudette y jouaient des missionnaires français. Je me souviens aussi de ce tipi loué chez Al, l’ancien chef du village. Inoubliable été 1994 où j’ai pu entrer de plein fouet en contact avec une Première nation riche d’histoire. Encore aujourd’hui, je garde de cette production un intense souvenir. »
— Sylvie Dufour, directrice artistique
1994-1995 : « Le bateleur »
« Ah, Le Batleur… L’époque du vieux TNO sur la rue King, avec sa table de pool, et notre chère Paulette. Ça évoque pour moi le début d’une longue et riche aventure avec Michel Ouellette, de belles rencontres avec des gens que je connaissais, et d’autres que je découvrais. Je revois le grand bar de Jean Barbe, tout en rouge… Il me revient à l’esprit des fou-rires, une gomme imaginaire, des trous de mémoire, The little Budda, des soirées bien arrosées… Le soin que je prenais à enfiler ma petite robe noire qui seyait bien ma silhouette d’antan et ma jeune vingtaine… Et cette robe me ramène soudainement sur les lèvres les nombreux baisers passionnés que mes deux personnages offraient ou volaient à l’un pis à l’autre – j’y ai Frencher l’équipe au grand complet! Tout le monde se brossait les dents et se gargarisait bien comme faut avant de fouler la scène. On craignait de se passer un rhume à l’époque! »
— Annick Léger, comédienne
1995-1996 : L'équipe
« Quelques souvenirs en vrac. Entrer en réunion au 90, rue King, mois de janvier, un mur tapissé de grandes feuilles blanches pour une planification stratégique dirigée par Paulette, et prendre place à la grande table de répétition (seul non-fumeur dans la gang!). Fierté d’un soir de première à la salle Jubilee avec Sylvie Dufour et Michel Ouellette, pendant que les rouleaux de la vieille laveuse de French Town sortent un drap à l’infini. Spectacle sous les étoiles dans les ruines d’un ancien couvent, The Manitoulin Incident, fruit d’une collaboration inédite et inoubliable avec la compagnie autochtone Debajehmujig. Fins de soirée joyeuses du conseil d’administration chez Golded Pizza afin de décanter les réunions denses et foisonnantes. Dévoilement par Stefan Psenak du tout premier site web du TNO (et un des premiers en Ontario français) lors de la soirée des 25 ans. Je me souviens tout spécialement du jour où on a mis les « fantômes » du TNO dans un coffre de tournée pour les amener avec nous lors du déménagement vers le site du Collège Boréal… Ces esprits bienveillants représentent l’engagement collectif des artistes, des bénévoles, employés, stagiaires, amis et collaborateurs qui ont mis l’épaule à la roue du TNO au fil des ans. Je ne doute pas qu’ils soient là à La Place des Arts, dès le premier lever de rideau, pour applaudir à tout rompre. »
— Robert Gagné, administrateur
1996-1997 : « L'homme effacé »
« Comme enfant, le TNO était pour moi un endroit magique. Je me souviens du noir des coulisses et de la chaleur des projecteurs. Je me souviens tout autant de la texture des costumes entre mes doigts, et l’atmosphère enjouée des comédiens avant un spectacle. Je me comptais tellement chanceuse d’être sur scène et j’ai été touché par l’appui que j’ai reçu sous forme d’exclamations, de rires et de pleurs de la part des membres de l’auditoire. Quelle expérience formatrice, et surtout, humaine. Quel plaisir de revenir au TNO comme adulte, et d’être témoin de cette même magie dans le jeu de ma sœur, Gabrielle, metteure en scène et comédienne »
— Camille Lalonde, comédienne
1998-1999 : « Contes sudburois »
« La performance de Roch Castonguay reste dans ma mémoire. Lors de la première lecture de table, Roch m’a regardé droit dans les yeux en lâchant « As-tu du feu? » J’ai répondu spontanément. Je pense même que j’ai répondu une deuxième fois avant de réaliser qu’il était en train de livrer son texte (celui de Robert Dickson). Il était un vrai pro: quelqu’un qui avait pris le temps de faire des choix avant d’arriver à la salle de répétition, quelqu’un qui peut se permettre une liberté avec son jeu parce qu’il possède le texte et défend une façon de le rendre. À chaque représentation, Roch prenait le temps de rouler une cigarette devant la foule avant de commencer. Il intégrait les premières phrases en allumant la cigarette, en tirant là-dessus une couple de fois, en cherchant où mettre les cendres et son allumette, en laissant la fumée s’envoler. Des moments silencieux remplis de sens pour moi, même après toutes ces années. »
— Michael Gauthier, comédien
1999-2000 : « Du pépin à la fissure »
« Lors de la première du spectacle, Alain m’avait fait promettre de venir à l’entracte pour l’informer des commentaires du public. On était assez nerveux. On sortait pas mal de la façon habituelle d’interpréter les textes de Desbiens. Un Belge! Ben voyons donc! Et il ne boirait pas de bières sur scène! On avait l’impression d’être un peu sacrilège. Lorsque je suis sortie dans le hall d’entrée pour l’entracte, il n’y avait pas un mot qui se disait. Un silence de salon mortuaire. J’en ai été sidéré. J’ai viré talons. Conformément à notre entente, je me suis dirigé à la loge pour rapporter honnêtement ce que j’avais vu. Pauvre Alain! Au bout du compte, le public était trop ému pour parler!
À la deuxième partie, Alain a même eu un tonnerre d’applaudissements à sa sortie du four qu’on voit ici. Faut dire que c’était tout un exploit!
Lorsqu’en répétition j’avais expliqué à Alain qu’une table allait se briser sous lui, qu’il allait se balancer accroché à un luminaire pour aboutir sur un réfrigérateur, être attaqué et avalé par celui-ci pour ressortir d’un fourneau rempli de boucane, il ne m’a pas cru! Puis, son visage s’est défait alors que la réalisation de mon sérieux s’imposait. Alors, avec son merveilleux visage à la Buster Keaton, il m’a dit calmement : « Je fais pas ça. » Moment mémorable cher Alain! »
— André Perrier, directeur artistique et metteur en scène
Années 2000
2000-2001 : « Univers »
« En regardant cette photo, la première chose qui me vient en tête c’est les rencontres… (C’est beaucoup ça le théâtre, des rencontres!) Tout d’abord celle d’une autrice Dominick Parenteau-Lebeuf… c’est elle qui a écrit mon personnage le Professeur Tchérenkhov (qui entre deux comas éthyliques a découvert les Neutrinos qui sont étudiés dans le laboratoire SNOLAB dans la mine Creighton de Sudbury). Puis, la rencontre des deux gars du Nouveau-Brunswick Luc Leblanc et Robert Gauvin (leur auteur était Herménégilde Chiasson) et la rencontre de Jean-Marc Dalphond et de Sasha Dominique (leur auteur à eux était Robert Marinier) C’est formidable, à chaque fois qu’on se voit, on est très heureux de se retrouver. Co-production du TNO de Sudbury et de L’Escaouette de Moncton.
La première a eu lieu à Moncton au Centre Aberdeen et c’est là que j’ai eu le plus grand trou de mémoire de ma vie. Et pas un trou que les gens te disent ç’a pas paru… non, un TROU qui a duré pour moi une éternité et pour le public… aussi. Comme je suis là pour vous le raconter, ça veut dire qu’on ne meure pas de ça. Ce soir-là j’ai failli abandonner le métier mais aujourd’hui, je suis très heureux d’avoir continué. Et comme disait mon Tchérenkhov : Na zdarovié! (Santé!) Et longue vie, cher TNO! »
— Guy Mignault, comédien
2001-2002 : « Violette sur la terre »
« Premier contrat, première tournée
22 ans déjà
J’ai déjà eu 22 ans
Fragments de souvenirs hors temps qui déferlent
Comme les déboulements dans les mines du Nord
Comme les vagues de la mer du Nord le premier soir de notre arrivée là-bas
Il y a
Les perles de Carole F.
La scène plongée dans la pénombre
L’accent trop sudburois à corriger
Il y a
Le trac à en faire vibrer les genoux au CNA
À Sudbury
À Montréal
En France
On est bêtes de cirque
Parfois on nous prend pour des Belges
Il y a
le jam improvisé avec les verres en cristal chez Jean-Guy à Rouyn-Noranda
les fleurs de François G. (et le message auquel je n’ai pas répondu 15 ans plus tard)
l’accueil inoubliable au Périscope
Il y aussi les cimetières de soldats canadiens à Dunkerque
le bruit des bombonnes d’oxygène dans la première rangée du théâtre à Roubaix
l’odeur de 67 différents gâteaux qui chauffent sous le jet d’une source four
dans une boîte à pain en métal vissée au décor
Il y a le rituel de cirer son archet lors du preset
l’espoir de jouer la bonne note sur le bord d’un baril d’huile
Et le maquillage de graisse noir qui colle à la paroi du bain
des semaines après une run
Quand le bain était propre enfin
On repartait on reprenait la route
À force de répéter et d’entendre les mêmes mots, soir après soir
Ville après ville, année après année
On se transforme
‘Il faut écouter les signes. Mais il en a tellement.’
Il y aura toujours la liste d’aberrations
les explosions au loin
les histoires d’amours ratées
le temps des cerises
presque à l’unisson
Et ses mots à elle qui résonnent encore
22 ans plus tard
‘Et si je dis : il faut rester, il faut partir, il faut aimer, il faut vivre, ça sonne faux, m’entendez-vous ?’ »
— Miriam Cusson, comédienne
2002-2003 : « Alice au pays des merveilles »
« Alice au pays des Merveilles, c’était mon premier pas sur les planches du théâtre communautaire et quelle initiation! Quand je repense à ce projet, la metteure en scène que je suis devenue depuis a le cœur qui palpite – mais quelle mouche a piqué Hélène Dallaire de vouloir monter une production si exigeante? Avec sa trentaine de comédiens de tous âges, des effets spéciaux complexes, des chorégraphies, des musiciens sur scène et en plus des prothèses en latex à gérer pour métamorphoser les comédiens en animaux méconnaissables; décidément, il faut être animé d’un brin de folie pour vouloir mettre sur pied un projet d’une telle envergure.
Je me souviens qu’un après-midi, Stéphane Paquette (qui jouait le rôle de la chenille) avait réussi à convaincre Hélène de nous prêter sa nouvelle Mini Cooper rouge pour aller faire la run de cafés au Tim’s pour l’équipe. En roulant les vitres baissées sur Lasalle, on chantait un duo de Zachary Richard et Isabelle Boulay à tue-tête en on se sentait libres comme l’air. La musique était très présente dans les coulisses au fil des répétitions et a aidé à souder notre équipe de comédiens, qui chantait et dansait dans les coulisses avant les représentations pour se donner de l’énergie. Je me sens privilégiée d’avoir connu une dynamique de groupe aussi riche que celle-là. »
— Gabrielle Lalonde, comédienne
2002-2003 : « Sahel »
« Un travail d’amour.
Je suis deux fois maman. C’est rare de voir des œuvres dédiés à la mère dans l’industrie de spectacle. Et c’est encore plus rare de voir des enfants sur scène. En fait c’est un adage bien connu de W.C. Fields qui dit : ‘Never work with children or animals’; ne travaillez jamais avec des enfants ou des animaux.
Sahel est l’épopée, un hommage à cette relation fondamentale de l’humanité; celle de la mère et son enfant.
J’ai eu l’opportunité d’incarner ce rôle primordial, la mère sur scène avec Jasmine Therrien qui a joué l’enfant.
Je l’ai jouée avec tout de moi. Avec soin, amour, j’ai dansé avec les paroles, j’ai dansé avec mon enfant, j’ai dansé avec l’auditoire, j’ai dansé au-delà des chansons, j’ai dansé avec le néant.
***
C’était la vie, l’inconnu qui est entrée en scène. Synchronicité, sérendipité. Ce qui nous arrive quand on arrête de forcer, quand on lâche prise. La naissance nous attend…
Car nous n’étions pas pour monter ce spectacle. C’était supposé d’être Les Nuits d’Iran, une pièce basée sur les œuvres d’Arash Montashami-Maali. Mais après trois semaines laborieuses de répétition à Montréal avec une équipe de six, André a décidé d’abandonner le projet.
Suite à notre retour à Sudbury, l’équipe a été dissoute et il n’y avait pas de projet pour le bloc de temps dans la saison, il fallait trouver quelque chose et vite. C’était une journée d’intempérie. André m’a convoquée dans son bureau. Il venait de recevoir une pièce non-sollicitée, inattendue par télécopieur et pouvais-je la lire, et lui donné ma rétro? Après l’avoir lu, j’étais abasourdie. Voilà notre solution pour remplacer Les Nuits d’Iran. Ce jour-là, curieusement, à cause de la tempête, une des employées avait son fils au travail. On était capable de faire une première lecture avec la vraie voix d’un enfant. Nous étions capable le jour même de lire et entendre la viabilité de cette proposition inattendue. Après la lecture, nous étions tellement touchés et bouleversés par ce texte magistral, par cet auteur inconnu, par cette offre imprévue.
Nous avons monté la pièce deux fois, en mars 2003 avec un décor en tissu et en septembre avec du vrai sable, la réception du public était tellement forte… silence totale après chaque prestation. On absorbe.
Le texte a gagné le prix du gouverneur générale. Seul et unique œuvre de Franco Catanzariti. Dix ans de peaufinement, gestation. Malgré son titre, malgré son context, à la fin de la deuxième série de représentations, Franco Catanzariti s’est rendu compte publiquement que ‘en fait c’est mon histoire, l’histoire de ma relation avec ma mère’.
La pièce était vraiment une collaboration, car nous l’avons montée ensemble dans si peu de temps… Un travail d’équipe époustouflante. Merci Franco, André, Jasmine, Gérald, Claude, Alain, Glen-Charles, Sylvie, Robert, Dan, Sondee, Miriam, Ivan.
J’ai tellement appris, j’ai tellement donné. On en parlera un jour. La mère et son enfant. Comme le désert, partout et toujours en même temps. Finalement c’est l’histoire d’untel et sa maman. C’est notre histoire. Un dialogue inachevé. Une forteresse d’appréciation qui nous attend, quand on écoute le silence, quand on entend la voix de l’autre, quand on pose des questions.
Sensuelle, avec le sable entre les orteils nous avons donné naissance à un chant épic et éternelle – la voix de la mère, et celle de l’enfant oubliés perdus dans le désert d’indifférence. Cette interrelation de questionnement, de responsabilité, d’engagement de lâcher-prise et d’épanouissement. La vie nous appelle. La vie nous attend.
Place à la mère, place à l’enfant toujours, maintenant, dorénavant. »
— Pandora Topp, comédienne
2003-2004 : « Le bourgeois gentilhomme »
« Tout un exploit! Imaginez, Le bourgeois gentilhomme de Molière passé dans le mélangeur créatif déjanté de la metteure en scène Miriam Cusson, ça donne une vaudeville avec des airs de big band et de boogie woogie. Nous étions plus d’une trentaine, jeunes et moins jeunes, qui avons travaillé pendant des mois à l’automne 2003 pour arriver à présenter cette pièce pour le moins flamboyante.
J’étais Dorante, ce comte ruiné sans scrupules, qui profite de la naïveté du bourgeois, monsieur Jourdain, pour lui emprunter continuellement de l’argent afin de conquérir la belle Dorimène. De longues soirées à répéter nos scènes, regarder les autres répéter, apprendre nos textes, essayer des costumes et j’en passe, pour finalement aboutir au marathon des représentations étalé sur deux semaines. C’est épuisant, mais surtout magique. Un bonheur que j’ai vécu à d’autres moments, L’île noire en 2000, Le gars de Québec en 1995 et Les fridolinades en 1990. De beaux souvenirs et surtout de belles rencontres avec les autres comédiens et les membres de l’équipe de production, qui forgent des liens durables. »
— Robert McMillan, comédien
2005-2006 : « Exit(s) (Confiance! Et Bang!) »
« Je m’appelle M. Démocratie.
Mes amis et moi sommes au théâtre et nous sommes spectateurs et spectacle à la fois, à notre insu.
Quelqu’un va mourir et je ne me souviens plus si c’est moi ou Carol Beaudry qui tiendra le fusil.
Nous sommes les prisonniers d’un spectacle dont on ignore les paramètres. Il faudra s’échapper par la fenêtre. Ou mourir. L’un ou l’autre.
C’est mon premier contrat de jeu avec une compagnie professionnelle. Je suis le seul Sudburois dans la gang et je suis un peu (pas mal) intimidé par les Ottaviens, mais je ne le dirai jamais.
C’est mon premier contrat de jeu avec une compagnie professionnelle et pendant les répétitions je planifie déjà mon exit. Ma retraite hâtive est annoncée avant même la première. Tout le monde me félicite et alimente gentiment l’illusion que je me prépare à habiter.
La fenêtre s’est ouverte sur la plus grande petite parenthèse de ma vie.
Et j’ai sauté par cette fenêtre, à maintes reprises, parce que dans le fond j’ai toujours eu confiance qu’un beau matelas m’attendait de l’autre côté du décor.
Bang ! »
— Daniel Aubin, comédien
2006-2007 : « Iphigénie en trichromie »
« Wow! Une de mes premières participations à un spectacle grand public. J’étais tellement impressionnée par les comédiens super talentueux que j’avais la chance de côtoyer, dont Vincent Leclerc avec qui je cohabitais pour la durée du projet. J’ai appris notamment qu’un bon comédien doit être très discipliné et travailler autant si non plus à la maison qu’en salle de répétition. En bonus, j’ai appris à cuire un poulet entier et faire une sauce pour l’accompagner! Et malgré ce que la photo peut laisser croire, non, Céleste Dubé et moi, on ne s’embrassait pas dans la pièce! 😉 »
— Anie Richer, comédienne
2007-2008 : « SLAGUE : L'histoire d'un mineur »
« Le premier souvenir qui me vient en tête, c’est le jour où j’ai entendu la voix de Jean Marc Dalpé sur mon répondeur. Il voulait que je le rappelle. Un texte de Mansel Robinson qu’il voulait traduire pour le TNO.
Ça m’a pris quelques heures pour rassembler mon courage.
J’ai lu la pièce et en suis tombée amoureuse. Je voulais en signer la mise en scène, question de me plonger dans cet univers minier et dans Sudbury, ma ville d’adoption depuis 2 ans.
J’ai dit oui pour la traduction. Jean Marc était content, puis m’a dit « En passant, je joue dedans. »
J’ai raccroché.
J’ai pris une grande respiration.
Je me suis dit « Ok Pineault, non seulement tu vas travailler sur le texte avec Jean Marc Dalpé, LE Jean Marc Dalpé… Tu vas aussi le mettre en scène… Dans un show solo… ».
Grosse respiration.
Grosse fucking respiration.
Et comme on dit, « It was the beginning of a beautiful friendship. »
Le TNO a nourri et défini l’artiste et la femme que je suis aujourd’hui. Je lui en serai éternellement reconnaissante.
J’ai « TNO-Sudbury » tatoué sur le cœur.
Longue vie et Joyeux 50e! »
— Geneviève Pineault, directrice artistique et metteure en scène
2007-2008 : « Le chien » (Deuxième version)
« Le plaisir de jouer cette trop brève scène de tendresse entre Céline et Jay ; avoir hâte de retrouver ce moment de complicité avec Marc Bélanger, quand nos regards se croisaient pour créer cette bulle de douceur et de vérité. Savourer ce délicieux mais fragile équilibre d’être à la fois devant un public mais seuls à deux.
La terreur du moment juste avant de plonger dans quelque chose de gros; compter les minutes avant d’entonner la première note de mon solo a cappella pour ensuite amorcer le grand périple de cette tragique finale. Arrivée à l’autre bout, mon soulagement et le silence si chargé d’un public ébranlé qui n’ose applaudir.
L’épatement devant le savoir-faire des 50 ans de métier d’Aubert Pallascio; être tenue en haleine à chaque fois qu’il entamait ce magistral monologue du grand-père. À plus de 70 ans, on n’a plus la mémoire du jeune premier, alors le blanc arrivait immanquablement et Aubert l’affrontait calmement pour enfin arriver à destination sans que le public ne s’aperçoive des nombreux détours. Tel le chat qui retombe toujours sur ces pattes.
En 2007, je jouais Céline pour la 2e fois en carrière, et à peine quelques mois plus tard, je portais encore la bedaine, mais cette fois, une vraie. »
— Manon St-Jules, comédienne
2008-2009 : « Bob va à la mer »
« Une douzaine de collaborations avec le T.N.O., des réminiscences tel un diaporama : allers-retours sur la 17, entre Ottawa et Sudbury… route inspirante… sueurs froides quand les tempêtes font rage… arrêts rituels au Tim à Chalk River, North Bay ou au Subway à Mattawa… plaisir toujours renouvelé de créer avec Geneviève Pineault, ma « Sister »… accueil chaleureux coutumier de l’équipe… public si ouvert et généreux… luminosité et grâce d’une comédienne à ses débuts… talent indéniable de Sandy Fortier… chandail licorne, souvenir d’un voyage à Wildwood à huit ans, sacrifié pour l’image finale du spectacle… souvenirs d’humanité et de bonheur! »
— Isabelle Bélisle, costumes
2008-2009 : « Songe d'une nuit d'été »
« Je me rappelle de ma première expérience comme concepteur de son, avec Hélène Dallaire, pour la pièce Le malade imaginaire, au TNO sur la rue King!
Toute la musique était enregistrée et performée live sur un clavier « Ensoniq », emprunté de Jules Ducharme. Plusieurs pièces ont suivi avec Hélène : Alice au pays des merveilles, Don Quichotte, Dix petits chats, Bonbons assortis et j’en passe…
Et, plusieurs pièces plus tard, je me retrouve avec Miriam Cusson dans la pièce Songe d’une nuit d’été. Plusieurs chanteurs, la musique « live », gros spectacle rock! Le talent des comédiens/comédiennes m’avait épaté. En passant, je ne vais jamais oublier les culottes spandex à Denys Tremblay. »
— Jacques Grylls, concepteur sonore
Années 2010
2010-2011 : « II (deux) »
« TNO people are light-years out of my orbit:
You like your Dinner un-Kraft-ed
Your Cheese un-Whiz-ed
Your Wine un-Box-ed
And you choose restaurants
With a bewildering variety of forks on the table cloth.
(Plus, you dress with far too much elegance and panache.)
But when Jean Marc agreed to a high-end luncheon
Of steamies et frites at the Montreal Pool Room
I knew he understood the character in Slag.
Geneviève laughed out loud
When I pitched Two Rooms as a story about paranoia, racism and murder –
“but NOT a musical.”
So I knew for sure she got what masquerades as my sense of humour.
And last, but actually first – Maureen Labonté,
a good friend of the company
(And Jean Marc’s wrangler)
Who in the very beginning introduced JMD to Slag and Ghost Trains.
Which means she forgives me
For electrocuting (mildly, I would argue) one of our actors (Paul Rainville)
When I stage managed her touring production of A Midsummer Night’s Dream
All those years ago.
Merci, mes amies.
I raise a glass to fifty more years
With love and gratitude.
P.S.
I have more un-Produced plays in the drawer. »
— Mansel Robinson, auteur
2011-2012 : « Les Rogers »
« Le TNO, c’est plus qu’une salle de spectacle ou une simple ‘boîte noire’. Le TNO c’est 50 ans de créations, d’explorations et de présentations! C’est au 90 rue King que j’ai appris la chanson ‘Dimanche après-midi’, que j’ai tourné mes premières scènes pour la télé avec le groupe JeunEsprit, que j’ai participé dans plusieurs pièces communautaires et où j’ai joué dans ma seule et unique pièce de théâtre professionnelle. Le TNO a été des plus importants pour mon cheminement en tant qu’artiste professionnel. J’espère voir le jour où l’on y soufflera 75 et même 100 chandelles! Chapeau! »
— Stef Paquette, comédien
2011-2012 : « Tout est dans le timing »
« Dans un espace qui a tellement d’histoire et de réputation, avec une équipe avec beaucoup de cœur, mon père et moi nous avons participé dans un de nos moments de théâtre préféré. On en parle même aujourd’hui lorsqu’on faisait un numéro de comédie musicale dans lequel je finissais dans un costume de tranche de pain, grâce à l’imagination brillant et hors de ce monde de Miriam Cusson. Où lorsque mon père interprétait un homme qui se prenais pour Edgar Degas. Celui-là, on s’en parle souvent. Tout est dans le timing nous a permis de trouver ce qu’on aimait ensemble. Même après les répétitions, on pratiquait ensemble chez nous, parce qu’on aimait le temps de qualité que ça nous a accordé. Ça se voit dans la photo, on a le même visage à peu près. Pour moi, c’était l’encouragement de poursuivre cette inspiration. D’ailleurs, plusieurs parmi cette famille qui entourait le personnage de Philippe Glass, c’était un début de chapitre. Pour d’autre, un précieux souvenir, tout chaud et près à servir. »
— Éric Lapalme, comédien
« Cette photo évoque pour moi, non seulement la joie de faire du théâtre avec mon fils pour la pièce communautaire du TNO, mais les autres moments où j’ai été comédien dans les pièces communautaires. Je me souviens entre autres de jouer le ‘méchant clown’, juché sur des grosses cannes de tomates, avec mon père dans l’auditoire qui riait à pleine voix. Mais ce qui me marque le plus c’est que le TNO a rendu des pièces de Shakespeare, d’Agatha Christie, d’Ionesco, de Tremblay, accessibles au public par le biais des pièces communautaires. Le TNO a donner la chance à des comédiens amateur d’être soutenus et de jouer dans des pièces de théâtre importantes alors que plusieurs professionnels attendent toujours leurs chances. Bravo TNO, merci pour votre implication dans la communauté et pour le développement de notre conscience culturelle. »
— Denis Lapalme, comédien
2012-2013 : « Zesty Gopher s'est fait écraser par un frigo »
« Ce dont je me souviens le plus de mon expérience au TNO lorsque je jouais le rôle de la grande Marie-Louise Painchaud, maîtresse de poste de Lovely, Ontario, c’est la joie et le partage humain, les larmes et le fou rire, du public du Grand Sudbury. Tomson Highway a créé un village à l’image de chez nous, un monde touchant et familier, et pendant la création c’est ce que j’ai senti sur le plateau, que j’étais en famille. Sous la direction de Geneviève Pineault, à côté de Tomson et de Jean-Yves Bégin, avec l’aide et l’appui essentiel de Marie-Josée Dionne, de Frédéric St-Onge, de Denise Vitali, et de toute la belle équipe du TNO, Zesty Gopher s’est [bien] fait écraser par un frigo en très bonne compagnie, en famille même, et surtout dans la joie. »
— Patricia Cano, comédienne
2014-2015 : « Silence en coulisse »
« Je le savais, lors de cette première lecture du texte Silence en coulisse, que j’allais passer quelques semaines inoubliables avec des gens passionnés et dévoués, tous encadrés par une équipe de production solide et le talent unique de notre très chère metteure en scène Hélène Dallaire. Et en effet, ce fût le cas… et ce fût toute une aventure!
Comment oublier les heures de création, les multiples répétitions ou bien ce décor colossal qui nous ont permis de jouer comme des fous et d’explorer nos personnages à fonds? J’entends encore les rires en abondance de généreux spectateurs et spectatrices, nuit après nuit, lorsque sont venues les représentations! J’ai aussi un flash d’une foule en délire, (et d’une troupe prise d’un tel fou rire), lorsque je suis sorti sur la scène suite à un changement de costume rapide… et non réussi. Ce sont de beaux souvenirs qui me font sourire et qui me permettent de rêver à nouveau… aux coulisses qui vibrent avec la joie de vivre et des salles combles remplies de belle énergie.
Tout simplement, merci… et longue vie au TNO! Bon 50e!!! »
— Jean-Paul Courtemanche, comédien
« Je n’ai que de bons souvenirs de mes moments sur scène et en répétitions lors des spectacles communautaires au TNO dans lesquels j’ai eu le grand plaisir de participer. La première pièce dans laquelle j’ai joué est Le diner de cons dans le rôle de Cheval en 2010. J’étais nouveau à ce genre de théâtre, mais j’ai profité pour apprendre. En 2013, j’ai joué dans la comédie Bonbons assortis dans le rôle de mon oncle Josaphat. C’est la première fois que j’ai eu un blanc de mémoire temporaire – un 15 secondes de sueur effrayante. En 2014 j‘ai joué dans La cantatrice chauve dans le rôle de M. Smith avec la charmante Alice Seguin. En 2015, c’était la comédie Silence en coulisse dans laquelle j’ai joué le rôle du cambrioleur un peu perdu. Un autre rôle avec lequel je me suis amusé est celui de Gino Barbieri dans la pièce Mambo Italiano en 2018. Finalement, en 2019 j’ai eu l’opportunité de jouer mon rôle favori, celui de Tony dans la pièce As is (Tel quel). En tout temps, les autres comédiens et moi, tous des amateurs, étions bien supportés par l’équipe professionnelle du TNO. Merci pour les beaux souvenirs. »
— Daniel Robillard, comédien
2015-2016 : « Un vent se lève qui éparpille »
« J’ai eu la chance de diriger en 2012 un atelier de scénographie offert dans le cadre d’un stage en formation continu organisé conjointement par l’ATFC et l’École nationale de théâtre du Canada. C’est dans ce contexte enchanteur que j’ai rencontré Geneviève – et Marie-Pierre également – la metteure en scène et directrice du TNO à l’époque. Nous sommes rapidement devenu amis et cette amitié nous a mené à développer une complicité artistique qui s’est amorcée sur ce projet de spectacle. Étant invité à y collaborer à tant que scénographe, j’ai eu le privilège de découvrir une région que je ne connaissais pas, Sudbury, et avec laquelle je suis tombée en amour, autant avec le lieu que la communauté. J’ai récupéré le décor après la tournée et l’ai remonté dans la cour arrière de ma maison qui se situe à Saint-Lazare au Québec, la région même d’où provenaient les authentiques planches de grange utilisées dans la scénographie. Même si celle-ci représente un moment dramatique figé dans le temps et l’espace, elle incarne pour moi parfaitement ce va-et-vient fluide entre les esprits créateurs du milieu du théâtre, et ce à l’échelle canadienne, et les riches rencontres et collaborations qu’il provoque. »
— Gabriel Tsampalieros, scénographe
2015-2016 : « Un neurinome sur une balançoire »
« Mon neurinome au TNO
Dickson est prisonnier quelque part dans ma tête
Ma tumeur craque sur la balançoire
Mon père est là
Je ne le vois plus mais il est là
Un coeur qui saigne dans la tempête
Un cri sourdine à s’arracher la tête
Un cri d’arrêt au mal de l’être
Un cri du coeur au TNO
Dickson appelle le cri des maux
Le coeur sanglant en étendard
Le coeur en sang comme un rempart
Je ferme les yeux pour mieux te voir
Je crie pour naître au TNO
Je crie pour naître devant toi
Je crie pour toi
Parfois pour lui
Je crie par toi
Je suis nu sur une chaise au milieu de nulle part
Seul sur la scène du TNO
J’ai froid
J’ai soif
Je ne l’entends plus
Prends-moi dans tes bras
Serre-moi très fort tout contre toi
Encore une fois
Au TNO
Comme quand c’était la première fois! »
— Alain Doom, auteur et comédien
2017-2018 : « Parmi les éclats »
« Parmi les éclats.
Première production professionnelle au TNO.
J’ai 27 ans. J’ai encore des boutons su’a face.
J’arrive comme une boule d’anxiété en répétition avec un syndrome d’imposteur aussi grand que le gros cinq cennes à Terre Dynamique.
En salle de répétition, je trouve une équipe de dynamite.
Dan, Sophie, Ivan, Radha, Patrick, MP, et Chloé T. (qui attend patiemment dans le « cocon »)
Il y a les louves
Les bêtes de scène
Les powerhouses
Miriam. Manon. Stéphanie.
Puis, il y a moi.
Avec ma boule d’anxiété au ventre
Et mes boutons su’a face.
Sur scène, le temps s’arrête.
À côté des louves
Je suis légère
Je suis intouchable
Je suis dynamite
Je me sens de plus en plus à ma place
Sur scène, le temps s’arrête.
Je ramasse de la vaisselle, des vêtements, des clefs,
On saute à travers le temps et l’espace
de Sudbury, à Salem, Massachusetts, au lac Ramsey
De Dickson à Plath,
de Carl Sagan à Haentjens
On the road again avec Danny B. et Bobby D.
À nowhere, à anywhere,
Pour finir au ventre de la terre avec Mary Poppins
And just like that. It was over.
What a ride it was. Et j’en serai toujours reconnaissante. Xx
Merci le TNO! »
— France Huot, comédienne
2018-2019 : « Jack »
« Un sourire se dessine sur mon visage à la vue des ces deux êtres merveilleux.
J’entends leur rire qui résonne et ça me console l’âme.
Jack
Un vent de chaleur
Une bouffée d’amour
Des éclats de rire à n’en plus finir
Un voyage au coeur de nos racines
Des rencontres marquantes et franches.
Se découvrir, s’apprivoiser, s’observer et s’aimer.
Les mots de Marie-Pierre qui vibrent
La voix feutrée de Jean-Marc au microphone
Les yeux brillants de France dans la pénombre
Un groove dans mes oreilles
Un magicien de la lumière
Des détails miniatures qui me replongent dans mon enfance
Le désir de partir, de prendre la route.
On the road.
Des heures, des jours, des semaines dans une ville magnifique,
À sillonner les sentiers environnants, à bouger.
On the road,
À respirer l’air frais du Nord
Me laisse charmer par ses paysages.
On the road.
There is nowhere to go but everywhere, so just keep on rolling under the stars »
— Magali Lemèle, metteure en scène