24 août, 2020 • Posté par Priscilla Pilon
Des nouvelles de nos artistes: Dan Bédard!
Toujours dans la série Nouvelles de nos artistes, nous nous sommes entretenus avec le maître du sonore, l’artiste Dan Bédard, qui a collaboré avec le TNO sur plusieurs de ses productions dont sa plus récente, Le Club des éphémères.
Se confiant à Jeffrey Kambou, notre stagiaire aux communications, Dan nous parle de travail à distance, son intérêt pour les musiciens Facebook et de faire maintenant ce qu’on remet toujours plus tard.
Jeffrey : Comment avez-vous passé ces derniers mois ?
Dan : Il fallait changer de direction, ça c’est clair. Mais l’essence de ce que je fais n’a pas changé. C’est encore de la création de musique et paysage sonores pour films, installations multimédias et théâtre virtuel, radio. C’est clair qu’on ne fait plus de concerts, mais ça reprend lentement.
J’ai aussi recommencé à enseigner un peu. J’ai enseigné la musique à l’université de 1988-2009. J’ai maintenant des étudiants en composition pour film que j’enseigne avec Zoom. Il fallait que j’apprenne à créer des vidéos tutoriels. C’était l’fun d’apprendre des nouvelles affaires.
Et puis j’ai un étudiant de guitare qui est assez avancé que j’enseigne quelques heures par semaine sur Zoom et on s’adapte au fait qu’on n’est pas assis face à face.
J: Vous arrivez à bien travailler sur Zoom ?
D: Oui. Il y a des jours où ça ne semble pas trop bien marcher, mais ça fonctionne bien je dirais 90% du temps. J’ouvre des logiciels simultanément avec Zoom et en même temps j’enregistre ma voix avec un micro. Les étudiants font de même de leur côté, alors c’est assez facile. Parce qu’on ne se voit que 3 heures par semaine, les vidéos tutorielles sont importantes. L’étudiant peut se référer aux vidéos où je fais les exercices et je manipule les logiciels quand on n’est pas en session. J’envoie aussi des notes détaillées chaque semaine.
J: Qu’est-ce qui vous manque le plus depuis le début de cette pandémie ?
D: Je suis un gars qui travaille beaucoup dans les petits cafés. Mon équipement est portable alors, quand je composais, je faisais les deux tiers dans les cafés. Maintenant je fais ça chez moi. Honnêtement, c’est mieux parce que j’ai accès à plus d’équipement, mais j’aime ça être entouré de gens qui prennent leur café, qui parlent de tout et de rien. Puis le contact humain me manque. J’ai été élevé dans une famille où on se donnait des caresses et c’est bizarre quand je vois des gens se présenter leur coude, c’est étrange.
J: Quelle est la dernière pièce de théâtre sur laquelle vous avez travaillé ?
D: On était au milieu de la pièce du TNO, Le Club des éphémères. On avait fait notre première fin de semaine de représentations, mais la deuxième a été annulée. On était censé aller à Toronto en avril-mai, qui a été annulé également.
J: Est-ce que vous avez eu la chance de travailler sur des projets personnels ?
D: Oui, côté guitare, je pratique beaucoup plus. Quand j’ai commencé ma carrière, j’avais 17-18 ans. J’étais un gars qui jouait de la musique folk, à la guitare, je chantais et j’écrivais des chansons. J’ai abandonné ce côté-là pour faire plus de composition et pour jouer de la basse.
Je pratique beaucoup plus de guitare maintenant. C’était intéressant au début parce que j’ai réalisé que comparé à ce que je faisais quand j’avais 20 ans mes doigts étaient devenus des saucisses, alors il fallait que je travaille là-dessus.
Et puis il y a des projets longs termes que je fais avec certaines personnes. J’ai des paysages sonores qui vont jouer bientôt.
J: Arrivez-vous à conserver votre créativité artistique ?
D: C’est comme toujours, ça change de jour en jour, de moment à moment. Il y a des jours où je me lève à 3 heures du matin parce que j’ai des idées créatives spontanées et il y a des jours ou je ne me sens pas du tout « créatif », je pense plutôt à acheter des épiceries et payer des factures. Je ne pense pas que j’ai beaucoup été affecté de ce côté-là.
J: Avez-vous un coup de cœur artistique récent ?
D: Je ne sais pas, j’écoute beaucoup de choses, toute sorte de styles. Je trouve que je revisite beaucoup de vielles affaires ou des compositeurs que j’adore. J’écoute beaucoup de Bartok ces temps-ci parce qu’il m’a toujours beaucoup inspiré. Je prends le temps de l’écouter comme il faut.
Mais c’est souvent des petites découvertes. Comme sur Facebook, les gens mettent des vidéos d’eux-mêmes qui jouent dans leur salon. Ce qui m’inspire, ce sont des artistes considérés comme « amateurs » dans leur salon qui jouent un solo de guitare ou qui ont une voix incroyable. Ce ne sont peut-être pas des musiciens professionnels connus, c’est juste qu’ils sont très bons.
J: Quels sont vos plans pour le reste de l’été ?
D: On continue à bûcher sur des projets. Quelques films pour le mois d’août, puis je travaille sur un projet de théâtre virtuel en radio 3D avec Eric Rose de Ghost River Theater à Calgary.
On a repoussé le spectacle du groupe Cage, mais je m’amuse à réinventer certaines des compositions et créer des nouvelles œuvres pour le groupe.
J: Cage a été reporté ?
D: Oui. C’est Stéphane [Gauthier de La Slague] qui pourrait t’en dire plus, mais des gens qui travaillent dans le monde digital viendront à Sudbury pour des conférences à ce sujet en mars 2021 et il a pensé que Cage, puisqu’on travaille avec de l’intelligence artificielle, serait un bon endroit pour présenter le spectacle.
J: Avez-vous une recommandation quarantaine ?
D: Un peu comme je fais avec la guitare. Quand on est en début de carrière et on n’a pas beaucoup de contrats, on a plus de temps pour raffiner ses connaissances et sa technique. Ensuite, on commence à travailler plus et si on est chanceux on travaille un peu trop. On travaille de longues journées et ce côté-là de notre existence artistique, le peaufinage et les heures de pratique, disparaissent un peu. Alors en ce temps de COVID, j’ai retrouvé cet esprit d’exploration et de perfectionnement. On a tous une liste de choses qu’on a toujours voulu apprendre, qu’on a toujours voulu essayer. Alors, c’est le temps de le faire.
J: Puis, si vous pouviez émettre un souhait pour le milieu artistique suite à la pandémie, ce serait lequel ?
D: C’est clair que les musiciens, les comédiens, les concepteurs, les techniciens, tout le monde qui est associé aux arts de la scène ont mangé une grosse claque.
J’espère qu’on verra un retour en salle bientôt, parce qu’il y a une énergie qui se passe entre artiste et foule qu’on ne peut pas reproduire autrement. On peut jouer dans notre salon, mais ce n’est qu’en jouant devant une salle pleine de spectateurs qui réagissent à ton œuvre, qu’on crée une expérience incroyable pour tous ceux qui sont présents.