3 novembre, 2020 • Posté par Priscilla Pilon

Des nouvelles de nos artistes : Isaac Robitaille!

De retour avec la série Nouvelles de nos artistes ! Nous nous sommes entretenus avec Isaac Robitaille, auteur faisant partie de la série de lectures publiques TNO : Unplugged ! 

Notre stagiaire en communications, Jeffrey Kambou, lui a posé quelques questions sur son texte Une anguille dans mon café qui sera mis en lecture ce jeudi au TNO. 

Jeffrey: Quel est le thème de votre texte ?

Isaac: Donc, parler thématiquement, c’est toujours un peu difficile parce que pour ça il faut avoir un regard critique sur le texte ce qui n’est pas nécessairement ce qu’il y a de plus constructif quand on écrit. Ça aide beaucoup d’avoir une idée de cohésion des thèmes, il se trouve que je n’en avais pas vraiment quand je me suis lancé dans ce texte.

Maintenant, si je regarde vers l’arrière et j’essaie d’y penser critiquement, je dirais qu’un des grands thèmes c’est la répétition. *Rires*. Ça, ce sera plus drôle une fois que vous aurez vu le texte. Mais oui, la répétition c’est un gros thème, la monotonie, l’absurdité. C’est ceux auxquels je peux penser en ce moment.

J: Quel type de texte avez-vous écrit ? Une comédie, un texte absurde ?

I: C’est une espèce de comédie absurde. Pas un genre de farce absurde, mais oui, une comédie.

Photo de la chatte d'Isaac. Elle n'est pas une fan du théâtre absurde, comme le démontre son nonchalant repos sur un casse-tête.

J: Qu’est-ce qui vous a inspiré à écrire ce texte?

I: Bien, au début du processus créatif, ce que je voulais c’était de créer une comédie légère. Parce qu’à l’époque, c’était pas mal tout ce que le TNO avait comme pièce et je me disais qu’il devait y avoir une raison. Donc je voulais écrire une petite comédie légère afin de me lancer en dramaturgie. L’idée à l’époque c’était d’aller faire une maîtrise en dramaturgie après et j’avais besoin d’avoir quelques textes dans mon répertoire. Donc, j’ai juste décidé d’écrire. La raison pour laquelle je ne précise pas exactement quel a été le processus de création, c’est parce que le texte a tellement changé depuis, que la comparaison, je crois, ne fera que rendre la version présente du texte moins clair dans son intention.

J: Est-ce que votre texte est toujours semblable à votre texte original ?

I: Non. *Rires*. Il y a une certaine révision, je pense que c’était la révision 3 ou 4 ou j’ai regardé mon texte et je me suis dit : « Tu sais quoi, ça ne marche pas », et j’ai complètement changé toute la pièce, en gardant à peine quelques éléments de la version originale, un personnage en fait. Ensuite, dans la révision 6, ce personnage a été complètement changé, au point où il ne reste rien de la pièce originale. C’est la raison pour laquelle je ne vais pas m’éterniser sur le concept que j’avais à l’époque.

J: Pourquoi avez-vous accepté de faire une mise en lecture de votre texte ?

I: Si je peux le décrire, j’ai pensé à une image l’autre jour pour expliquer où j’en suis avec ce projet. C’est un peu comme si j’avais trouvé une grosse roche à la plage et j’avais l’impression qu’il y avait quelque chose à l’intérieur, mais je n’étais pas certain. Donc je l’ai ramené chez moi, je l’ai lavé, je l’ai poli et maintenant je vois que c’est un très beau coquillage, mais je n’ai toujours aucune idée de ce qu’il y a à l’intérieur. Mais j’ai peur que si je brisais la pierre pour vérifier, je découvrirais qu’il n’y avait rien. Maintenant mon seul recours, c’est de montrer la pierre à d’autres personnes et d’espérer qu’eux autres pourront me dire s’ils pensent qu’il y a bel et bien quelque chose à l’intérieur.

J: Tu as écrit la première version de ce texte pendant que tu étais toujours à l’université ? 

I: Oui. Durant ma 3e année d’université, je me levais à 4h30 du matin parce que j’avais lu quelque part que si tu te levais tôt tu écrivais mieux. Mais ça n’a pas fonctionné. *Rires* 

J: Quelle est la suite pour ce texte ? 

I: Je n’écris plus vraiment tant que ça. En fait, c’est un miracle que cette pièce se fasse lire parce qu’à la fin de ma 3e année d’université, j’avais plus ou moins abandonné l’écriture. Je m’étais dit que ça n’en valait pas la peine, que je n’étais pas bon et je ne voulais même plus faire une maîtrise en dramaturgie. Donc, essentiellement, ce qui s’est passé c’est que j’ai déposé ma plume, je me suis dit « OK, j’ai terminé », j’ai envoyé le texte à Alain Doom et à Miriam Cusson, parce qu’ils étaient intéressés, mais ils étaient vraiment occupés et n’avait pas vraiment de temps libre.  

Equelques mois plus tard, ils m’ont dit: « Heille, on aime bien ça, on aimerait bien que tu fasses une lecture avec le programme de théâtre », et j’ai dit non. Ensuite, j’ai eu mon cours de stage et il fallait que je trouve quelque chose à faire. J’ai accepté de faire une lecture avec l’Université Laurentienne et là le coronavirus est arrivé et il n’y a pas eu de lecture. Ensuite le TNO m’a dit: « Heille, on a entendu parler de ton texte »parce que Antoine Côté Legault était mon conseiller dramaturgique, durant mon cours de stage et ils ont eu l’idée d’utiliser le texte dans leur série Unplugged en partenariat avec l’université et je n’avais aucune objection. C’est là où on en est.

Photo du carnet où il a écrit la première version de son texte.

J: Pourquoi avez-vous accepté de faire une mise en lecture après avoir refusé ? 

I: *Rires* La paresse m’a fait changer d’idée. J’étais rendu à mon cours de stage et Alain Doom me demandait de trouver quelque chose à faire. J’étais un peu débordé donc j’ai pris quelque chose sur lequel j’avais déjà travaillé en me disant : « Heille, on pourrait faire quelque chose avec ça. Peut-être que ce temps-là ne sera pas perdu au final ». *Rires* 

J: Que recherchez avec cette mise en lecture ? 

I: Il y a le gros de voir si les spectateurs vont trouver quelque chose que je n’ai pas vu après avoir écrit le texte quelquefois. Mais c’est aussi parce que j’ai envie de voir comment ça va paraitre une fois que c’est jouer et interprété par des comédiens. Parce que quand moi je le lis, et c’est quelque chose qui vient avec le niveau de langue que j’utilise, un niveau de langue assez soutenu quand même, un niveau de langue assez artificielle, c’est que je lis tout comme si j’étais en train de lire un roman ou une pièce française des années 60 et je crois que ça va avoir un effet différent quand c’est mis en bouche par des franco-ontariens de 20 ans. Ils ont tendance à ne pas parler de la même façon. 

J: Et vous êtes plutôt éloigné du processus de création de cette mise en lecture n’est-ce pas ? 

I: Oui ! C’est quelque chose qu’on m’a recommandé en me disant qu’avoir l’auteur dans la salle de répétition, ce n’est pas nécessairement la meilleure chose et j’ai tendance à être d’accord. C’est aussi un peu parce que j’ai déjà beaucoup de choses à mon horaire et que rajouter ces répétitions en plus, je ne voyais pas comment ça aurait été constructif. Je crois que c’est mieux de laisser la metteure en scène avoir le contrôle sur cette mise en lecture et de laisser les comédiens faire leurs propres affaires sans trop d’interférence de ma part.  

Bien sûr, plusieurs de mes comédiens étaient déjà impliqués dans le projet avec l’université l’année dernière donc, plusieurs d’entre eux ont déjà entendu ce que j’avais à dire à propos de la pièce. Donc je ne suis pas entièrement retiré. S’ils m’envoient une question à 2 heures du matin et qu’ils me disent : « Qu’est-ce que cette ligne-là veut dire ? ». Je serais capable de leur répondre : « Bien je ne le sais pas moi ! » 

J: Vous êtes réveillé à 2 heures du matin ? 

I: Non. Non en fait je dors d’habitude par 22h. 

J: Prévoyez-vous continuer à écrire ? 

I: Je n’en ai aucune idée. Ça va dépendre de si je trouve quelque chose que j’ai envie d’écrire. Parce qu’avec ce projetlà l’idée c’était d’écrire juste pour écrire parce que je me disais qu’à un moment donné j’allais devoir écrire pour vrai. Il se trouve que jusqu’à maintenant je n’ai pas eu besoin d’écrire pour vrai. 

J: Qu’est-ce qui vous manque le plus depuis la pandémie ? 

I: Honnêtement, c’est très curieux, mais j’aimais bien aller en cours et avoir des débats, des discussions sur certains sujets, des discussions développées. Et bien sûr, même sans la quarantaine je ne pourrais plus aller à l’université pour ça puisque j’ai terminé mon baccalauréat. Mais à défaut de ça, je serais peut-être allé dans un café, comme au Kuppajoe ou au Cedar Nest, pour avoir un débat avec quelqu’un. C’est quelque chose que je n’ai pas fait depuis un bout de temps et ça m’embête un peu.  

J: Quelle est la dernière pièce que vous avez vue ? 

I: La dernière pièce que j’ai vue en tant que spectateur ? Ouf, ça, c’est difficile. Je crois que c’était soit Le Club des Éphémères ou Les monologues du vagin. 

J: Avez-vous eu un coup de cœur artistique récemment ? 

I: Il y a un roman que j’avais lu au tout début de la pandémie, qui s’appelle Pachinko. C’est une saga historique à propos de plusieurs générations d’une famille de coréens, installé au Japon un peu avant, pendant et après la Deuxième Guerre mondiale. C’est de la fiction historique. C’était très bon, je le recommande très fortement. C’est très émouvant, très puissant. Ça montre une réalité colonialiste, qui n’est pas souvent représentée, la réalité des Coréens au Japon. Très bon. 

J: Avez-vous une recommandation quarantaine ? 

I: Je ne sais pas, trouvez une façon de relaxer un peu. Ça va changer pour tout le monde. Pour moi, la quarantaine fonctionne assez bien pour mon rythme de vie, puisque ça me permet d’être très productif sans quitter mon chezmoi. Le seul problème c’est que ça devient très dur de débrancher et de trouver une façon de relaxer. Évidement je ne peux pas prescrire la méthode de relaxation optimale pour qui que ce soit, que ce soit prendre une marche, cuisiner ou manger des funyuns en écoutant des anime. 

Photo du chat d'Isaac avant d'attaquer une anguille.

J: Qu’avez-vous fait durant la pandémie ? 

I: J’ai travaillé. Je travaille présentement au Centre Franco-Ontarien de Folklore depuis le mois de mai environ et c’est du télétravail donc je fais ça de la maison. Avant ça, je finissais les quelques derniers mois de mon baccalauréat. Et entre ces deux moments-là, honnêtement, je ne m’en rappelle pas. Je pense qu’il y a eu une semaine où je n’étais ni en train de travailler, ni en train d’étudier et j’ai pu profiter de la quarantaine pour rattraper une quarantaine d’heures de sommeil et c’est à peu près tout. Donc je continue de pratiquer mes langues, je continue à faire de l’exercice. En plus de mon travail, je fais aussi un peu de bénévolat. Je suis un bénévole pour le comité des arts médias et culture de Black Lives Matter Sudbury. 

J: Si vous pouviez émettre un souhait pour le milieu artistique suite à la pandémie, ce serait lequel ?   

I: Qu’on ait du financement, mais ça ce serait un souhait en général ! *Rires* Mais en fait, pour reprendre un enjeu social qui a été mentionné récemment, le groupe Black Lives Matter Sudbury, avait fait des demandes au conseil municipal, une de leur demande c’était d’avoir plus de représentation de personnes PANDC (Personnes Amérindiennes, Noires et de Couleur) dans les conseils qui donne du financement essentiellement et d’avoir plus de financement au niveau municipal pour les arts, plus particulièrement pour les arts issus de la diversité, de l’internationalité aussi.